« Les victimes d’abus sexuels dans le contexte ecclésial, ainsi que la société dans son ensemble, doivent pouvoir s’assurer que l’Église catholique en Suisse lutte contre les abus de pouvoir et a pris des mesures de prévention efficaces Les paroles et promesses ont débouché sur des actes. Le processus visant à empêcher efficacement les abus de toute nature ne prendra toutefois jamais fin. L’Église, à l’instar de l’ensemble de la société, doit faire sien ce sujet, à tous les niveaux et sous toutes ses formes, et sans cesse remettre l’ouvrage sur le métier pour mettre au point et appliquer ensemble les mesures de prévention requises. »

Mgr Joseph Bonnemain, responsable de la commission d’experts de la Conférence des évêques suisses « Abus sexuels dans le contexte ecclésial »

Au cours de l’année 2025, l’Église catholique romaine mettra en œuvre de nouvelles coopérations et appliquera de nouveaux standards et processus pour empêcher les abus sexuels et leur dissimulation et pour offrir une aide aux victimes professionnelle dans toute la Suisse : depuis le début de l’année, les services de signalement ecclésiaux ne proposent plus leur propre aide aux victimes, mais renvoient systématiquement aux services d’aide aux victimes reconnus par les cantons, où les personnes concernées bénéficient d’un soutien et de conseils indépendants.

dans toute la Suisse, les personnes concernées peuvent s’adresser à des spécialistes indépendants auprès des services d’aide aux victimes reconnus par les cantons. Les services d’aide et leurs offres sont publiés sur www.aide-aux-victimes.ch.

En 2021, les trois institutions ecclésiastiques nationales de Suisse – la CES, la RKZ et la KOVOS – ont décidé conjointement de faire effectuer une recherche scientifique indépendante sur l’histoire des abus sexuels commis sur des mineurs et des adultes par des membres du clergé catholique, des employés de l’Église et des membres de communautés religieuses en Suisse depuis les années 1950. Les résultats du projet pilote d’un an (2022-2023) ont été publiés le 12 septembre 2023. La collaboration avec le séminaire historique de l’Université de Zurich se poursuivra dans le cadre d’un projet de suivi (2024-2026) d’un montant de 1,5 million de francs. En outre, les trois mandantes ecclésiastiques ont décidé d’autres mesures à l’échelle nationale.

Il s’agit pour l’Église de se pencher sur son passé et d’assumer ses responsabilités à l’égard des personnes concernées et de la société dans son ensemble. L’objectif principal est de lutter encore plus résolument contre les abus dans ses propres rangs et contre leurs causes, mais aussi d’empêcher de nouvelles maltraitances.

Reconnaître l’échec et le surmonter

Le rapport final du projet pilote, publié le 12 septembre 2023, montre que les abus sexuels et leur dissimulation faisaient également de manière systémique partie de l’Église catholique suisse. D’importantes caractéristiques fondamentales de l’Église catholique ont rendu possibles, voire favorisé, des abus sexuels de cette ampleur. Il s’agit des « constellations de pouvoir spirituelles, sociales et économiques […] qui ont marqué les abus dans l’environnement de l’Église catholique en Suisse depuis 1950 et qui sont “spécifiquement catholiques” ». Il s’agit par exemple des positions de pouvoir cléricales et des abus spirituels, de l’image des prêtres ainsi que de la politique de formation et de personnel qui, par le passé, n’a pas ou peu testé les futurs aumôniers quant à leur aptitude professionnelle à travailler avec les gens. Cela relève également d’une morale sexuelle qui, en imposant un large tabou sur la sexualité, « empêchait de parler des abus et de les sanctionner. » L’attitude envers les femmes, qui étaient souvent utilisées comme main-d’œuvre, constituait également une base pour le harcèlement et la violence, en particulier dans les foyers et les écoles gérés par des communautés religieuses.

Au cours des 20 dernières années, de nombreuses institutions ecclésiastiques ont déjà entrepris différentes démarches pour faire le point sur ce qui s’est passé et pour lutter préventivement contre le risque d’abus sexuels. Outre la poursuite de la recherche scientifique, la CES, la Conférence centrale et la KOVOS ont décidé de prendre d’autres mesures pour remédier aux lacunes institutionnelles au niveau national :

  1. Pour les victimes d’abus ainsi que les informatrices et informateurs, des offres professionnelles seront créées dans toute la Suisse, où ils peuvent signaler les abus.
  2. Les futurs prêtres, les diacres permanents, les membres de communautés religieuses, de même que les agentes et agents pastoraux devront à l’avenir passer des évaluations psychologiques standardisées dans le cadre de leur formation.
  3. Des normes minimales seront introduites pour la gestion des dossiers personnels et pour la transmission d’informations pertinentes sur les collaboratrices et collaborateurs de l’Église.
  4. Les membres des trois mandantes s’engagent à ne plus détruire de dossiers en rapport avec des cas d’abus ou documentant la manière dont ils ont été traités.

Les bases pour la professionnalisation de la gestion du personnel ont été élaborées

Au cours des derniers mois, un guide a été élaboré avec le concours de l’entreprise spécialisée en questions RH von Rundstedt. Il précise les standards pour la tenue et l’archivage des dossiers personnels ainsi que pour la transmission d’informations personnelles. Afin de garantir son adéquation avec la pratique à tous les niveaux, les responsables du personnel ont été invités à donner leur avis à son sujet. Des offres de formation pour l’application correcte de ce guide devraient être données à partir du milieu de l’année 2025.

Un assessment psychologique (procédure de clarification) a été mis au point en collaboration avec le professeur Jérôme Endrass, chef Recherche et développement à l’Office pour l’exécution judiciaire et la réinsertion du canton de Zurich, et son équipe. Il sert de base pour une procédure de sélection rigoureuse et uniforme à l’échelon national. À l’avenir, les candidats au ministère et les futur-e-s agent-e-s pastoraux devront tous passer cet assessment.

À cet effet, l’Église catholique a défini des standards à respecter impérativement. Ils reposent sur des compétences de base nécessaires pour acquérir les aptitudes propres au travail pastoral et à l’exercice fructueux de cette activité. L’assessment a pour but de vérifier ces compétences et de détecter les éventuels risques pour des tiers. La Conférence des évêques a approuvé l’introduction et la mise en œuvre des assessments à l’échelon national dès le milieu de l’année 2025. Des questions liées à l’organisation et à la communication doivent encore être examinées.

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